PluMe MasterMind atelier d'écriture
J’ai lu pour vous… Meurtres pour rédemption
22 février 2024
PluMe MasterMind atelier d'écriture
Le coaching éditorial
24 février 2024

Trouver des idées de nouvelles

PluMe MasterMind atelier d'écriture

Trouver des idées de nouvelles

Un scénariste professionnel est capable de puiser dans le code civil ou dans les Pages Jaunes de l’annuaire pour écrire une série de 6 épisodes !… C’est un métier il est vrai. Pour autant, comment trouver facilement des idées de nouvelles ? Voici quelques pistes faciles à mettre en œuvre.

Tout le monde se rappelle d’Usual Suspect, le film de Brian Singer de 1995 aux deux oscars. La narration, non linéaire, suit l’interrogatoire mené par l’agent Kujan d’un petit truand portant bien son nom, Verbal Kint. De fait (attention, spoiler…), on sait que toute l’histoire est inventée au fur et à mesure par Verbal qui s’inspire de son environnement immédiat, notamment le tableau d’affichage qu’il a en face de lui.

Ceci nous montre qu’une bonne histoire n’est pas si difficile que cela à trouver. Il faut simplement avoir un peu d’imagination, mais aussi comprendre les objectifs d’une intrigue.

L’intrigue : une machine à trouver des idées de nouvelles

L’intrigue participe de la tension narrative. Le lecteur est tenu en haleine par des mystères, des zones d’ombre, des incohérences, un questionnement qui se dévoilent au fur et à mesure qu’il avance dans sa lecture. C’est ceci qui constitue la tension narrative : ce dévoilement partiel qui a lieu progressivement. Qui est ce personnage ? Pourquoi agit-il ainsi ? Pourquoi recherche-t-il ceci de cette manière ?

Certains écrivains sont devenus maîtres dans cet art du dévoilement progressif. Les œuvres de Stephen King, par exemple, fonctionnent souvent sur une seule bonne idée, qui est exploitée tout au long du roman, mais qui est dévoilée très tard dans la narration. Dans Shining, l’enfant-lumière, le titre ne dévoile rien et amène même à une fausse piste. C’est l’Overlook, l’hôtel isolé, qui est le personnage principal et qui incite tous les personnages à agir comme ils le font : l’Overlook ne fait que concentrer en un seul lieu passé, présent et avenir, ce qui permet aux protagonistes de perdre leurs repères et de devenir fous. Dans Carrie, il ne se passe rien d’autre que la vengeance d’une jeune fille écorchée vive qui, face à une vie d’adolescente assez dure mais néanmoins encore inscrite dans les limites de la normalité, réagit en utilisant un talent de télékinésie. Stephen King use toujours d’un réalisme profond ancré dans une culture américaine consensuelle, dans lequel il introduit une bonne idée force, comme l’enfance sacrifiée ou l’incompréhension due à la violence.

L’intrigue d’une nouvelle ou d’un roman est ce qui tient le lecteur en haleine. Souvent, c’est un décalage entre un fait, une vision du monde ou une manière d’agir d’un personnage, et le quotidien, qui rendent un roman ou une nouvelle intéressants.

Le décalage : constituant naturel pour trouver des idées de nouvelles

Ainsi, pour trouver des idées de nouvelles, il n’est pas toujours besoin de chercher à immerger le lecteur dans un monde ultra-complexe, hyper-original, giga-inédit qui a demandé dix ans de cogitations intenses à l’auteur.

La bonne idée qui fonctionne est celle qui permet de profiter d’un décalage et de le mener au bout. Nul besoin d’aller chercher midi à quatorze heures, ni de transférer des inuits sous l’Équateur. Les maîtres de la nouvelle, de Borges à Buzzati,de Poe à Maupassant, se contentent de manier le paradoxe dans des univers souvent extrêmement immergés dans le quotidien. Que se passerait-il si j’enfilais un pull-over le matin avant d’aller au travail, sans arriver à en trouver les manches ni la sortie ? Que se passerait-il si je prenais l’ascenseur mais que celui ne s’arrête jamais de monter ? Que se passerait-il si, au détour d’un chemin, je rencontrais mon double ? Que se passerait-il si je réussissais le meurtre parfait mais que, pris dans la pure solitude de ma réussite, mon orgueil me poussait à en parler à un commissaire ? Que se passerait-il si…

Le lecteur va suivre l’intrigue car l’auteur va l’amener à se questionner sur son quotidien et lui-même simplement grâce à l’insertion d’un détail inédit, surnaturel, fantastique ou illogique dans son quotidien.

Du quotidien au quotidien

Dès lors, trouver des idées de nouvelles n’est pas si sorcier. Lire les journaux suffit souvent à mettre en relief des faits absurdes, illogiques, injustes ou inadmissibles. C’est lorsque l’on ressent un sentiment fort de répulsion, d’iniquité, d’abus, de refus, de scandale, bref : un sentiment fort, que l’on peut se dire qu’une idée n’est pas loin.

Par exemple, lors d’un atelier d’écriture il y a peu, une participante était particulièrement choquée par l’idée qu’en Europe, là en ce moment, des cadavres d’immigrés puissent venir s’échouer quotidiennement sur une plage paradisiaque à Lampedusa, en Italie. Il est certes possible d’en tirer une nouvelle ou un article de blog afin de dénoncer ce scandale. Mais il est fort à parier que le lecteur n’y trouvera pas son compte, car ce fait historique et social n’est pas, en l’état, suffisant pour constituer une intrigue comme telle.

Par contre, puisque la tension narrative est souvent issue d’un décalage entre ce qui est narré et la quotidienneté, que se passerait-il si la scène était décrite du point de vue d’un chat ? Celui-ci, en tant que regard extérieur ne jugeant pas, ne faisant pas de sentiment et donc non plus de mièvrerie ni de sensationnalisme, permet au contraire de dénoncer froidement l’absurdité de la situation. Le lecteur peut d’ailleurs ne comprendre qu’il s’agit d’un regard de chat qu’à la fin de la nouvelle, ce qui constitue la tension narrative. On réutilise ici ni plus ni moins le bon vieux procédé littéraire cher aux philosophes des Lumières comme Montesquieu dans ses Lettres persanes ou Voltaire dans Candide, d’un regard extérieur et impartial permettant de mettre en relief les absurdités du monde sans les juger par la simple description objective du quotidien. Décrire de manière légère des choses trop lourdes offre un excellent décalage narratif.

On se rend bien compte que le quotidien est le meilleur trésor à idées qu’on puisse trouver. Et bien souvent, c’est l’écart entre un point de vue original et ce quotidien qui permet de trouver de bonnes idées de nouvelles.

Une lecture récréative sur le sujet

(c) Photo Boris Foucaud

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *